
LES 8 ÉTAPES DE KOTTER
Votre feuille de route pour transformer votre organisation
Toutes celles et tous ceux qui ont, un jour, de près ou de loin, travaillé sur les problématiques de conduite du changement ont déjà entendu parler des 8 étapes du changement selon Kotter. C’est LE grand classique.
Pour faire très bref (mais nous allons entrer dans le détail par la suite), voici ces fameuses 8 étapes :
- Créer un sentiment d’urgence
- Constituer une coalition directrice
- Développer une vision et une stratégie
- Communiquer la vision du changement
- Lever les obstacles
- Produire des victoires à court terme
- Consolider les gains et produire plus de changement
- Ancrer les nouvelles pratiques dans la culture
Mais qui est donc John KOTTER ?
Avant de nous intéresser à ces fameuses 8 étapes de Kotter qui ont marqué l’histoire des stratégies d’entreprise et des ressources humaines, intéressons-nous tout d’abord à l’auteur. Qui est ce fameux Joel P. Kotter ? Comment-a-t-il atteint le statut de Maitre Jedi de la conduite du changement?
John Kotter est né en 1947 à San Diego en Californie aux Etats-Unis (et ce monsieur est toujours en vie aujourd’hui, en 2024). L’homme est brillant. Il commence par suivre des études au prestigieux MIT, Massachusetts Institute of Technology, où il obtient un Master of Science en 1970. Mais, comme le MIT sur un CV, c’est un peu léger 🙂 il s’inscrit ensuite à la Harvard Business School, où il décroche un MBA en administration des affaires.
Il commence sa carrière en tant que professeur à Harvard Business School. Il commence à enseigner très jeune et il est nommé professeur titulaire dès l’âge de 33 ans.
Il est l’auteur de nombreux ouvrages de référence sur le leadership et le changement. L’ouvrage dans lequel il aborde sa méthode des 8 étapes est Leading Change, qui a été publié pour la première fois en 1996 (par Harvard Business School Press).
Il devient rapidement, aux États Unis d’abord puis au niveau international, LE spécialiste du management, du leadership et de la conduite du changement.
En 2001, suite à un sondage réalisé par Business Week Magazine auprès de 504 entreprises, il est élu « leadership guru ». Ce n’est pas la légion d’honneur, mais c’est quand même un peu classe.
Le plus simple est peut être de vous montrer qui est ce monsieur (c’est une vidéo de 2013 où il ne parle pas spécifiquement des 8 étapes mais, de façon plus générale, de changement des organisations au 21ème siècle… mais c’est histoire de vous présenter John).
Mais revenons plus spécifiquement à la conduite du changement… Commençons par comprendre ce qui à conduit Jhon Paul Kotter à s’intyresser au sujet et à développer sa stratégie en 8 étapes.
Le constat initial de Kotter : un changement majeur ne se produit jamais aisément
Dans le cadre de ses recherches, de ses études terrain auprès des entreprises sur une période de quinze ans, Kotter constate que 70% des initiatives de changement organisationnel au sein des entreprises se soldent par un échec.
« 70 % des initiatives de changement organisationnel échouent ! »
Mais pourquoi serait-il si difficile de faire évoluer une organisation ? John P. Kotter explique clairement que le changement majeur est rarement facile, et ce pour plusieurs raisons :
1. Résistance naturelle au changement
Kotter identifie la résistance au changement comme un obstacle fondamental. Les employés, les managers et même les dirigeants se sentent souvent à l’aise dans des systèmes existants, même si ceux-ci ne sont plus optimaux (notons ici que ce constat peut être fait bien au-delà ds managers et ds entreprises… l’être humain, en général). La routine et l’autosatisfaction sont des facteurs importants dans cette résistance. Cela pousse les entreprises à négliger l’urgence de se transformer, d’où l’échec de nombreuses initiatives de changement.
2. Sous-estimation de l’importance du leadership
Kotter insiste sur le fait que le leadership, et non la simple gestion, est la clé pour initier et guider efficacement un changement majeur. Il estime que la gestion seule ne peut pas surmonter les obstacles émotionnels et psychologiques qui bloquent souvent les transformations. Pour lui, sans un leadership fort et inspirant, un projet de changement n’a que peu de chances de réussir. Soulignons ici que le « leadership » ne dépend pas uniquement de la position hiérarchique dans l’entreprise.
3. D’autres erreurs fréquentes
Kotter observe que plusieurs erreurs communes sont responsables des échecs dans la conduite de transformations majeures. Ces erreurs incluent :
• L’autosatisfaction : les entreprises n’instaurent pas un sentiment d’urgence suffisant pour initier le changement.
• Sous-estimer la puissance de la vision : les organisations ne créent pas une vision claire et motivante pour diriger le changement.
• Mauvaise communication : la vision du changement n’est pas suffisamment communiquée ou répétée.
Face A ces constats, Kotter travaille sur une approche rationnelle et structurée pour aider les organisations à évoluer en profondeur. C’est ainsi qu’il met en place sa méthode en huit étapes.
Les 8 étapes de Kotter
Ces 8 étapes, nous les avons évoquées en tout début d’article. Mais, entrons maintetant dans le détails.
1. Créer un sentiment d’urgence
L’objectif est de sensibiliser les membres de l’organisation à la nécessité du changement. Cela peut passer par la présentation de données alarmantes, d’opportunités à saisir, ou par la mise en lumière des risques associés à l’inaction. Kotter insiste sur l’importance de faire comprendre aux équipes que le statu quo n’est plus viable. Il s’agit de réveiller l’organisation en lui montrant que si elle ne réagit pas rapidement, elle risque de perdre sa compétitivité ou de manquer des opportunités cruciales. Si je devais me permettre de reformuler les propos de Kotter,je dirais que le message que vous devez faire passer est « changer ou mourrir ».
Pourquoi c’est important ?
Comme nous l’avons vu précédemment, il y a une résistance naturelle, instinctive au changement. Un sentiment d’urgence permet d’éviter la complaisance et incite les équipes à agir rapidement. En clair, s’il n’y a pas un sentiment d’urgence, il n’y aura pas suffisamment d’implication en interne pour pouvoir changer les choses en profondeur, sur le long terme.
Kotter explique que 75% des dirigeants doivent être convaincus que le statu quo est plus risqué que le changement avant même de lancer une transformation.
Sans cette prise de conscience collective, les projets de changement échouent souvent dès les premières étapes.
Comment le faire ?
Organisez des réunions, partagez des analyses de marché, ou des témoignages clients pour illustrer l’importance du changement.
L’idée est ici de s’appuyer sur des éléments factuels, tangibles et concrets pour crédibiliser votre démarche, et non simplement sur une vision personnelle.
Le sentiment d’urgence doit, en effet, être ancré dans des faits, basé sur des données précises qui démontrent que l’organisation est en danger ou qu’elle peut saisir une opportunité unique. Par exemple, Kotter propose d’utiliser des indicateurs de performance en baisse (ex. : CA, ROI, part de marché,…) des changements dans le marché ou la concurrence pour illustrer le besoin d’une réponse immédiate.
Il peut même être utile de provoquer des “crises contrôlées” pour créer cette prise de conscience, comme l’augmentation des objectifs ou l’examen public des performances défaillantes.

Des exemples concrets
Exemples de réussite : créer un sentiment d’urgence
1. Apple sous Steve Jobs (réussite) :
• Contexte : En 1997, à son retour chez Apple, Steve Jobs a trouvé l’entreprise au bord de la faillite. Il a immédiatement compris que l’urgence était capitale pour redresser la situation.
• Création du sentiment d’urgence : Jobs a suscité un sentiment d’urgence en réduisant immédiatement la gamme de produits d’Apple, en arrêtant des projets non rentables, et en communiquant largement sur la nécessité de se concentrer sur l’innovation et le design. Il a également mis en lumière les menaces concurrentielles, notamment l’avance de Microsoft, et a souligné que sans une transformation rapide, Apple disparaîtrait.
• Résultat : En créant un sentiment d’urgence et en le renforçant par des actions visibles (réorganisation, coupure de produits), Jobs a obtenu un engagement massif de la part des équipes, permettant à Apple de retrouver sa compétitivité et de lancer des produits iconiques comme l’iMac et plus tard l’iPhone.
2. Ford Motor Company sous Alan Mulally (réussite) :
• Contexte : En 2006, Ford était en difficulté financière, perdant des parts de marché face à Toyota et d’autres constructeurs. Alan Mulally a été embauché comme PDG pour redresser la situation.
• Création du sentiment d’urgence : Mulally a convoqué les cadres de Ford et leur a exposé l’état critique de l’entreprise. Il a montré des données chiffrées sur les pertes colossales et la dégradation des parts de marché. Il a également insisté sur le fait que l’inertie et les conflits internes étaient les plus grands ennemis de Ford. En augmentant la transparence, en organisant des réunions régulières où les chiffres étaient partagés ouvertement, il a encouragé chacun à comprendre la nécessité du changement.
• Résultat : Grâce à ce sentiment d’urgence clairement communiqué, Mulally a réussi à aligner les efforts autour d’une vision unique : “One Ford”, ce qui a permis à l’entreprise de revenir à la rentabilité.
Exemples d’échec : Ne pas créer un sentiment d’urgence
1. Kodak (échec) :
• Contexte : dans les années 1990, Kodak dominait le marché de la photographie argentique. Cependant, l’avènement de la photographie numérique représentait une menace directe à son modèle d’affaires.
• Absence de sentiment d’urgence : bien que Kodak ait été au courant des avancées technologiques numériques, les dirigeants n’ont pas réussi à créer un sentiment d’urgence suffisant. Ils se sont reposés sur leurs lauriers, pensant que le marché argentique resterait dominant. Ils n’ont pas su convaincre l’organisation de la gravité de la menace numérique, ce qui a entraîné un lenteur d’adaptation.
• Résultat : cette absence d’urgence a conduit Kodak à manquer l’opportunité de pivoter vers le numérique, et la société a fini par faire faillite en 2012, dépassée par des acteurs plus innovants comme Canon et Sony.
2. Nokia (échec) :
• Contexte : Leader sur le marché des téléphones mobiles dans les années 2000, Nokia a pourtant échoué à s’adapter à l’arrivée des smartphones tactiles, notamment après le lancement de l’iPhone en 2007.
• Absence de sentiment d’urgence : Les dirigeants de Nokia n’ont pas su mobiliser leurs équipes autour de l’urgence du changement. Malgré les signes évidents du marché, l’entreprise a continué à se concentrer sur son système d’exploitation Symbian, tout en sous-estimant l’importance de l’écosystème d’applications et de l’expérience utilisateur tactile apportée par iOS et Android.
• Résultat : Cette autosatisfaction et le manque de réaction rapide ont conduit à une perte massive de parts de marché et ont précipité la chute de Nokia, qui a été racheté par Microsoft en 2013.
2. Constituer une coalition directrice – comité de pilotage
Bon, vous avez bien mis en place la première étape et chacun, au sein de votre organisation, est conscient de l’état d’urgence dans lequel vous vous trouvez. Mais pour mettre concrètement en œuvre ce changement organisationnel, il ne suffit pas d’avoir partagé votre vision et convaincu vos collaborateurs. Il faut une équipe forte, motivée et influente pour guider et diriger le processus de transformation. Cette équipe, Kotter la désigne comme « guiding coalition », « coalition directrice » donc, mais , en France, on utilise plus volontier des termes tels que « équipe de pilotage » ou « comité de pilotage »
Cette « coalition directrice » ne se compose pas seulement des dirigeants de l’entreprise, mais doit inclure des leaders influents à tous les niveaux. C’est un point clé. Le changement ne peut pas venir uniquement du « haut de la pyramide hiérarchique ».
Pourquoi c’est important ?
• Inspiration et crédibilité : une équipe solide peut inspirer et influencer les autres membres de l’organisation. La crédibilité de cette coalition est essentielle, car les employés doivent avoir confiance dans le leadership et croire que le changement est porté par des personnes capables de le mener à bien.
• Surmonter les résistances : le changement rencontre souvent des résistances, qu’elles soient conscientes ou inconscientes. Une coalition influente, bien placée au sein de l’organisation, est capable d’agir pour briser ces résistances, en convainquant les sceptiques et en engageant l’ensemble des collaborateurs. Cela permet d’éviter les blocages liés aux freins internes, qu’ils soient d’ordre hiérarchique ou culturel.
• Coordination et alignement : la coalition directrice a pour rôle d’assurer une vision partagée du changement et de coordonner les différentes actions à entreprendre. Cela permet d’éviter les initiatives dispersées ou contradictoires, en garantissant que tout le monde travaille vers un objectif commun.
Comment le faire ?
1. Identifier les leaders d’opinion
Les membres de l’équipe de pilote doivent être influents, non seulement par leur position hiérarchique, mais aussi par leur réputation et leur capacité à mobiliser. Voici les profils à inclure dans cette équipe :
• Leaders formels (dirigeants) : il s’agit des dirigeants officiels, comme le PDG, les directeurs des divisions, ou les chefs de département. Leur inclusion est essentielle pour mobiliser les ressources, prendre des décisions stratégiques, et donner de la légitimité au projet de changement.
• Leaders informels (influence non hiérarchique) : ces collaborateurs, bien qu’ils n’aient pas de pouvoir hiérarchique formel, jouent un rôle majeur grâce à leur influence personnelle. Ils peuvent aider à rallier les équipes et à convaincre les résistants au changement. Voici quelques exemples :
• Collaborateurs respectés pour leur expertise technique : experts reconnus dans leurs domaines spécifiques (par exemple, ingénieurs principaux ou développeurs), ils sont souvent écoutés et respectés au sein de l’organisation.
• Influenceurs culturels : employés dotés de charisme et de compétences relationnelles qui savent motiver et rassembler les équipes.
• Syndicalistes ou représentants des employés : leur inclusion dans la coalition peut garantir la transparence et contribuer à l’acceptation des changements au sein des équipes.
• Managers intermédiaires : ces profils sont essentiels car ils connaissent bien les réalités opérationnelles et peuvent transformer la vision stratégique en actions concrètes.
2. Former une équipe multidisciplinaire
La coalition directrice doit représenter plusieurs fonctions et niveaux de l’organisation pour s’assurer que toutes les perspectives sont prises en compte. Une équipe diversifiée favorise une plus grande adhésion des différentes unités de l’entreprise.
Par exemple, inclure des responsables des RH, du marketing, des opérations, et de la finance permet de couvrir tous les aspects du changement et d’assurer une vision intégrée.
3. Créer de la confiance et de l’engagement
Une fois l’équipe constituée, il est essentiel de créer une dynamique de confiance et de collaboration. Kotter recommande d’organiser des séminaires hors-site pour encourager des discussions franches et bâtir des relations solides entre les membres.
Chaque membre de l’équipe doit être pleinement engagé dans le processus de transformation, partager la vision, les objectifs, et la stratégie.

Des exemples concrets
Exemples de réussite : Constituer une coalition directrice
1. General Electric (GE) sous Jack Welch (réussite) :
• Contexte : Lorsque Jack Welch est devenu PDG de General Electric en 1981, il a rapidement identifié la nécessité de transformer radicalement l’entreprise pour rester compétitive.
• Constitution de la coalition : Welch a formé une équipe de dirigeants et de leaders influents pour l’aider à redéfinir la culture de GE et à mettre en œuvre des changements drastiques. Il a choisi des personnes capables de casser les silos organisationnels et de promouvoir une vision claire à travers l’entreprise.
• Résultat : Cette coalition a non seulement aidé à surmonter la résistance interne, mais elle a aussi contribué à l’adoption de pratiques innovantes telles que le Six Sigma. GE est devenu une des entreprises les plus performantes au monde sous la direction de Welch, en grande partie grâce à la solidité de cette coalition directrice.
2. Starbucks sous Howard Schultz (réussite) :
• Contexte : Lors de son retour chez Starbucks en 2008, Howard Schultz a trouvé l’entreprise en difficulté. Les ventes étaient en baisse, et la marque perdait de son éclat.
• Constitution de la coalition : Schultz a formé une coalition de dirigeants issus de différents départements (finance, marketing, innovation produit), mais il a aussi impliqué des managers de terrain, qui comprenaient les réalités des cafés au jour le jour. Il a mis en place une réunion hebdomadaire pour que l’équipe directrice reste alignée et engagée dans le processus de redressement.
• Résultat : Grâce à cette coalition, Starbucks a pu réorganiser ses priorités stratégiques, réinventer l’expérience client, et se redresser rapidement, avec une rentabilité retrouvée dès 2009.
Exemples d’échec : absence de coalition directrice
1. Yahoo (échec) :
• Contexte : Yahoo, autrefois un leader de l’internet, a perdu sa position dominante face à des concurrents comme Google et Facebook, notamment en raison de son incapacité à s’adapter aux nouvelles tendances du marché numérique.
• Absence de coalition : Lorsque Marissa Mayer est devenue PDG en 2012, elle n’a pas réussi à former une coalition directrice influente. Bien qu’elle ait lancé plusieurs initiatives pour redresser Yahoo, il manquait une équipe de soutien cohérente et forte pour exécuter sa vision à travers les différentes divisions de l’entreprise.
• Résultat : Le manque de soutien interne a contribué à l’échec des projets de transformation de Yahoo, qui a été racheté par Verizon en 2017.
2. Sears (échec) :
• Contexte : Sears, autrefois un géant de la vente au détail, a rencontré des difficultés dans les années 2000 avec la montée de la concurrence, notamment d’Amazon.
• Absence de coalition : Le PDG de l’époque, Eddie Lampert, a échoué à constituer une coalition de dirigeants pour mener la transformation de l’entreprise. Ses décisions étaient centralisées, et il n’a pas su mobiliser d’autres leaders pour mener des initiatives stratégiques.
• Résultat : Cette absence de leadership partagé a contribué à l’échec des efforts de modernisation, et Sears a fini par déclarer faillite en 2018.
3. Développer une vision et une stratégie
Vous avez convaincu vos équipes de la nécessite d’un changement, vous avez constitué un comité de pilotage solide, vous devez maintenant élaboré votre vision et votre stratégie. La vision est essentielle pour orienter les efforts et donner un sens aux actions. La stratégie, quant à elle, permet de décliner cette vision globale en actions concrètes, en définissant les moyens nécessaires pour atteindre vos objectifs.
Pourquoi c’est important ?
- Clarté et orientation : une vision claire offre à tous les membres de l’organisation une image précise de l’avenir que vous souhaitez créer. Elle aide à aligner les efforts de chacun et à éviter la dispersion des initiatives ou des actions incohérentes. Une vision bien définie agit comme un fil conducteur tout au long du processus de transformation.
- Mobilisation des équipes : une vision bien définie inspire et motive les équipes. Elle donne à chacun une raison de s’engager dans le changement et de comprendre le « pourquoi » derrière chaque action. Une vision puissante est un catalyseur qui réunit les équipes autour d’un objectif commun, stimulant l’effort collectif et l’engagement à long terme.
- Faciliter la prise de décision : la stratégie, qui accompagne la vision, offre un cadre de prise de décision clair. Elle permet de prioriser les actions, d’identifier les étapes à franchir et d’allouer les ressources de manière optimale. Cela aide à éliminer les incertitudes quant à la direction à suivre et à maintenir le cap.
- Durabilité et adaptabilité : La vision doit servir de point de référence immuable, même lorsque la stratégie évolue en fonction des circonstances. La stratégie peut s’ajuster aux défis et opportunités, mais la vision reste le cap vers lequel tout le monde doit converger.
Comment le faire ?
- Créer une vision inspirante
- La vision doit être à la fois ambitieuse et réaliste. Elle doit donner une image attrayante de l’avenir tout en restant atteignable. Une bonne vision est suffisamment générale pour permettre des initiatives variées, mais suffisamment précise pour guider les actions.
- Impliquer les équipes dans la création de la vision renforce son adoption. Lorsque les employés se sentent partie prenante de la définition de l’avenir de l’entreprise, ils sont plus susceptibles de la soutenir activement.
- Exemple : Lors de la réorganisation d’une entreprise, une vision pourrait être : « Devenir leader du secteur en proposant les produits les plus innovants et accessibles à nos clients. »
- Développer une stratégie concrète, fixer des objectif conrets, chiffrés
- La stratégie doit détailler comment atteindre la vision. Il s’agit de décomposer la vision en objectifs spécifiques (chiffrés et concrets), en étapes claires, et en moyens à mettre en œuvre. Cela inclut l’alignement des ressources humaines, financières et technologiques avec les priorités définies dans la stratégie.
- Impliquer les équipes dans l’élaboration de la stratégie est essentiel pour que chacun puisse relier son travail quotidien à la vision globale. Cela permet de créer un lien direct entre la vision et les actions des collaborateurs.
- Kotter recommande de structurer la stratégie autour de quelques priorités clés qui permettront de progresser rapidement vers la vision. Cela peut inclure des ajustements organisationnels, des innovations produits, ou des changements dans les processus internes. Bien entendu, ces objectifs stratégiques doivent être mesurables (importance de déterminer les bons KPI), accessibles et compatibles entre eux.

Exemples concrets
Exemple de réussite : La renaissance de Microsoft sous Satya Nadella
- Contexte : En 2014, Satya Nadella a pris les rênes de Microsoft alors que l’entreprise était en perte de vitesse, notamment face à Google et Apple.
- Développement d’une vision : Nadella a rapidement formulé une vision claire : « Faire de Microsoft un leader dans le cloud et l’intelligence artificielle ». Cette vision a permis à l’entreprise de se recentrer sur des secteurs porteurs.
- Développement d’une stratégie : Il a mis en place une stratégie en se concentrant sur la transition de l’entreprise vers le cloud, tout en intégrant des services innovants comme Azure et des solutions d’intelligence artificielle. Cela s’est accompagné d’une refonte de la culture d’entreprise, basée sur la collaboration et l’apprentissage continu.
- Résultat : Sous la direction de Nadella, Microsoft est redevenu l’un des leaders technologiques mondiaux, avec des parts de marché dominantes dans le cloud et l’IA.
Exemple d’échec : La chute de Blockbuster face au streaming
- Contexte : Blockbuster était leader dans la location de films, mais n’a pas su réagir face à l’évolution du marché avec l’arrivée du streaming.
- Absence de vision et de stratégie : La société n’a pas su développer une vision claire pour s’adapter aux nouveaux modes de consommation. Elle est restée concentrée sur ses magasins physiques, tandis que des concurrents comme Netflix ont adopté une vision tournée vers l’avenir, basée sur la diffusion en ligne.
- Résultat : Blockbuster a échoué à formuler une stratégie pour répondre à l’évolution technologique, et l’entreprise a fait faillite en 2010.
Sans une vision claire et une stratégie bien définie, le changement devient une série d’actions déconnectées. La vision apporte un sens, et la stratégie fournit une feuille de route pour avancer vers un avenir commun, tout en garantissant une cohérence et une efficacité tout au long du processus de transformation.
4. Communiquer la vision du changement
Maintenant que le « comité de pilotage » a développé une vision claire et une stratégie concrète, l’étape suivante consiste à communiquer cette vision efficacement à l’ensemble de l’organisation. Il ne suffit pas d’avoir une vision inspirante, il faut la partager constamment et de manière convaincante pour que chacun la comprenne et s’y engage.
Pourquoi c’est important ?
- Aligner les efforts : une communication claire permet à tous les membres de l’organisation de comprendre exactement où vous allez et pourquoi. Cela assure que les efforts de chacun sont alignés vers un objectif commun, évitant ainsi la confusion ou la dispersion des actions.
- Renforcer l’engagement : en partageant régulièrement la vision, vous renforcez l’implication des équipes. Les employés doivent comprendre comment leur travail contribue directement à la réalisation de cette vision. Si les gens ne savent pas pourquoi les changements sont nécessaires ou ce qu’ils doivent accomplir, ils seront moins motivés.
- Créer de la cohérence : si la vision est mal communiquée ou n’est répétée qu’une seule fois, elle risque de se diluer et d’être mal comprise. Une communication constante permet de maintenir la cohérence dans les messages, ce qui garantit que tout le monde est sur la même longueur d’onde.
Comment le faire ?
- Communiquer régulièrement et à tous les niveaux
- Il est important de répéter la vision de manière continue, via plusieurs canaux de communication (réunions, notes internes, vidéos, etc.). La communication ne doit pas être une action unique, mais un processus constant. Les managers et dirigeants doivent constamment rappeler la vision dans leurs interactions quotidiennes.
- L’objectif est de s’assurer que chaque employé, quel que soit son poste, est au courant de la vision globale et sait comment elle guide les actions quotidiennes de l’entreprise.
- Utiliser des histoires et des métaphores
- Une bonne façon de rendre la vision plus compréhensible est de l’expliquer par des histoires, des exemples concrets ou des analogies qui parlent aux employés. Cela aide à transformer la vision en un concept plus tangible et plus facile à mémoriser.
- Exemple : Lorsque Steve Jobs a repris Apple, il a souvent utilisé des analogies pour expliquer la simplicité et l’élégance des produits qu’il voulait créer, facilitant ainsi l’adhésion de ses équipes à sa vision.
- Engager les managers comme relais de la vision
- Les managers intermédiaires jouent un rôle essentiel dans la diffusion de la vision. Il est crucial qu’ils comprennent bien la vision et la stratégie afin de la relayer correctement à leurs équipes. Leur rôle est d’aider leurs équipes à comprendre comment la vision affecte leur travail quotidien et de veiller à ce que chacun soit aligné avec l’objectif global.
- Faire participer les employés dans la communication
- En plus de transmettre la vision, donnez aux employés l’occasion de poser des questions et de participer aux discussions autour de la vision. Cela permet d’améliorer la compréhension et l’adhésion au changement, car les collaborateurs se sentent écoutés et inclus dans le processus.

Exemples concrets
Exemple de réussite : Google et la communication de sa vision “Organiser l’information mondiale”
- Contexte : depuis ses débuts, Google a adopté une vision claire : “Organiser l’information mondiale et la rendre universellement accessible et utile”.
- Communication de la vision : cette vision simple, mais puissante, a été répétée constamment à travers chaque département de Google. Les dirigeants, dont les fondateurs Larry Page et Sergey Brin, ont toujours rappelé cette vision lors de chaque étape de développement de l’entreprise.
- Résultat : en s’assurant que chaque employé comprenne et partage cette vision, Google a pu aligner ses équipes vers un objectif commun, ce qui a permis d’innover rapidement et de croître de manière exponentielle tout en restant fidèle à sa mission.
Exemple d’échec : BlackBerry et l’incapacité à communiquer une vision adaptée aux smartphones modernes
• Contexte : à la fin des années 2000, BlackBerry dominait le marché des smartphones avec ses appareils à clavier physique, plébiscités notamment par les entreprises pour leur sécurité et leur messagerie instantanée.
• Absence de communication d’une nouvelle vision : Lorsque les smartphones tactiles (iPhone, Android) ont commencé à changer le marché, BlackBerry n’a pas su communiquer une vision claire pour s’adapter à cette nouvelle tendance. Bien que l’entreprise ait reconnu l’importance de l’évolution technologique, elle n’a pas communiqué une vision convaincante de son futur dans un monde de plus en plus tourné vers les écrans tactiles et les écosystèmes d’applications.
• Résultat : En n’adoptant ni une vision convaincante ni une stratégie claire pour faire face aux nouveaux défis du marché, BlackBerry a perdu de manière dramatique ses parts de marché au profit de ses concurrents. Cela a conduit à sa chute quasi-totale dans le secteur des smartphones grand public.
5. Inciter à l’action et lever les obstacles
Même si vous avez mené les étapes précédentes avec brio, vous serez probablement confronté à des des réticences, voire même de vraies résistances. Vous devrez donc, au cours de votre démarche, réussir à lever les obstacles qui peuvent freiner ou bloquer le changement. À ce stade, il est essentiel de supprimer les freins structurels, culturels ou humains pour permettre à l’organisation de progresser vers la vision définie.
Pourquoi c’est important ?
- Faciliter l’action : les obstacles peuvent prendre la forme de structures hiérarchiques, de processus inefficaces ou de résistances humaines. Si ces freins ne sont pas éliminés, ils ralentiront ou bloqueront le changement. Lever ces obstacles permet de faciliter la mise en œuvre des actions et d’encourager l’initiative.
- Motiver les équipes : lorsque les employés se heurtent à des barrières internes, cela peut diminuer leur motivation et leur engagement. En identifiant et en supprimant les obstacles, les collaborateurs se sentent soutenus, ce qui les encourage à continuer à travailler pour atteindre les objectifs de changement.
- S’assurer de la cohérence : lever les obstacles assure une cohérence entre la vision, la stratégie et l’exécution du changement. Si des freins ne sont pas traités, les actions entreprises risquent d’être désalignées et de manquer d’impact.
Comment le faire ?
- Identifier les obstacles principaux
- Commencez par diagnostiquer les freins qui empêchent les employés de suivre la nouvelle vision et stratégie. Ces obstacles peuvent être de différentes natures : des processus rigides, une culture organisationnelle ancrée, un manque de compétences, ou des ressources insuffisantes. Il est crucial de les identifier et de les classer par ordre de priorité.
- Exemple : dans une entreprise qui introduit un nouveau logiciel, un obstacle majeur pourrait être le manque de formation ou la peur du changement technologique.
- Éliminer les obstacles structurels
- Si la structure organisationnelle actuelle freine le changement (par exemple, des chaînes de décision trop longues ou des processus trop bureaucratiques), envisagez de les réorganiser pour accélérer l’exécution de la stratégie.
- Simplifiez les processus décisionnels, réduisez les couches hiérarchiques inutiles, ou ajustez les systèmes de reporting pour mieux soutenir les actions liées à la transformation.
- Soutenir les employés et leaders dans leur transition
- Certains employés ou managers peuvent résister au changement parce qu’ils manquent de compétences ou de ressources pour s’adapter. Il est important de fournir des formations adéquates, des outils et un accompagnement pour que les équipes puissent pleinement contribuer à la réussite du changement.
- Parfois, il est nécessaire de remplacer ou redéployer des collaborateurs dont les compétences ou la vision ne sont pas alignées avec la stratégie. Ces ajustements peuvent être douloureux, mais ils sont souvent indispensables pour garantir le succès du projet.
- Offrir un cadre favorable à l’initiative
- Encouragez une culture d’initiative en récompensant les employés qui trouvent des solutions pour surmonter les obstacles. Si les employés sentent qu’ils ont la liberté d’agir, ils seront plus motivés pour résoudre les problèmes et proposer des idées innovantes.

Exemples concrets
Exemple de réussite : General Electric sous Jack Welch
- Contexte : Lorsque Jack Welch a pris les rênes de General Electric (GE), il s’est rapidement rendu compte que la structure de l’entreprise, trop bureaucratique, était un obstacle majeur au changement.
- Leverage des obstacles : Welch a lancé une série de réformes pour simplifier les structures hiérarchiques, réduire les couches de management, et favoriser la prise de décision rapide. Il a également instauré une culture de performance et de responsabilité, éliminant les managers qui freinaient l’évolution de l’entreprise.
- Résultat : En levant ces obstacles structurels et humains, Welch a libéré l’innovation et l’agilité de GE, permettant à l’entreprise de devenir l’une des plus compétitives de son secteur.
Exemple d’échec : La restructuration manquée de Nokia
- Contexte : Dans les années 2000, alors que la concurrence dans le secteur des smartphones devenait de plus en plus féroce, Nokia a entrepris une restructuration pour tenter de s’adapter à l’arrivée de l’iPhone et d’Android.
- Obstacles non levés : Cependant, Nokia a échoué à lever certains obstacles structurels et culturels qui freinaient l’innovation. Le modèle organisationnel en silo et la résistance des équipes à abandonner le système d’exploitation Symbian ont rendu impossible une transition rapide vers des solutions plus compétitives.
- Résultat : Incapable d’éliminer ces freins, Nokia a perdu son leadership sur le marché et n’a jamais pu retrouver sa position dominante dans l’industrie des smartphones.
Lever les obstacles est une étape cruciale dans le processus de changement. Sans une identification et une suppression des freins organisationnels, culturels ou humains, les efforts de transformation risquent de stagner. En éliminant ces obstacles, vous facilitez l’exécution de la stratégie et renforcez l’engagement des équipes, permettant à l’organisation de progresser vers sa vision avec fluidité et efficacité.
6. Obtenir des succès rapides
Dans son livre « Leading Change » (conduire le changement), Kotter parle plus exactement de “générer des victoires à court terme”. Mais on parle bien de la même chose. L’idée est de décomposer l’objectif final en sous-objectifs plus facilement atteignables et de célébrer chaque réussite pour maintenir la motivation et l’engagement.
Pourquoi c’est important ?
• Renforcer la motivation : les victoires rapides créent un sentiment de succès et de progression. Elles montrent aux collaborateurs que leurs efforts portent leurs fruits, ce qui stimule leur motivation à poursuivre les initiatives de changement. Sans ces victoires, l’enthousiasme peut retomber et laisser place à la frustration.
• Convaincre les sceptiques : certaines personnes dans l’organisation peuvent être résistantes au changement ou peu convaincues de son utilité. Les victoires à court terme servent à prouver que le changement est possible et souhaitable. Elles permettent de montrer des résultats concrets qui réduisent les doutes et favorisent l’adhésion.
• Soutenir la coalition directrice : les victoires rapides permettent à la coalition directrice de justifier ses actions et de montrer que le processus fonctionne. Cela renforce la crédibilité de l’équipe qui guide le changement.
Comment le faire ?
- Identifier des objectifs à court terme atteignables :• Il est essentiel de fixer des objectifs réalistes et atteignables dans un délai court. Ces objectifs doivent être suffisamment importants pour avoir un impact visible mais réalisables dans un laps de temps relativement court, généralement de 3 à 6 mois.• Exemple : Un objectif à court terme pourrait être de réduire les coûts dans une division spécifique ou d’augmenter la satisfaction client dans un segment donné.
- Créer des victoires visibles et mesurables :• Les victoires à court terme doivent être mesurables et visibles pour toute l’organisation. Il est crucial de s’assurer que les résultats obtenus sont suffisamment tangibles pour que les équipes puissent les constater. Cela pourrait inclure l’amélioration des indicateurs de performance, des succès commerciaux ou des retours positifs des clients.• Exemple : Si une nouvelle technologie est introduite, une victoire rapide pourrait être l’implémentation réussie dans un service clé, avec des améliorations mesurables de la productivité.
- Récompenser les succès :• Les victoires rapides doivent être reconnues et célébrées. Célébrer les réussites montre à vos équipes que chaque effort compte et renforce leur engagement. Cela peut se faire sous forme de reconnaissance publique, de récompenses ou simplement en mettant en avant les équipes qui ont permis ces succès.• Exemple : Organisez un événement interne pour reconnaître les contributions des employés qui ont aidé à atteindre ces objectifs.
- Communiquer largement les victoires :• Il est important de communiquer les victoires à tous les niveaux de l’organisation pour montrer les progrès. Assurez-vous que ces victoires soient relayées non seulement en interne, mais aussi, si nécessaire, auprès des parties prenantes externes (clients, partenaires, etc.). Plus les succès sont visibles, plus ils motivent les équipes à poursuivre le processus de changement.

Exemples concrets
Exemple de réussite : IBM sous Lou Gerstner
• Contexte : En 1993, Lou Gerstner a pris les rênes d’IBM, une entreprise alors en difficulté, avec des résultats financiers en chute libre et une perte de compétitivité.
• Générer des victoires à court terme : Gerstner a d’abord fixé des objectifs à court terme axés sur la réduction des coûts et l’amélioration de la rentabilité. Il a notamment lancé des programmes de réduction des dépenses, et une première victoire a été la capacité de générer un bénéfice net après une période de pertes.
• Résultat : En générant ces premiers succès financiers, Gerstner a pu restaurer la confiance des employés et des actionnaires, ce qui a permis à IBM de se repositionner pour des réformes plus ambitieuses à long terme.
Exemple d’échec : J.C. Penney et la stratégie mal exécutée de Ron Johnson
• Contexte : Lorsque Ron Johnson a été nommé PDG de J.C. Penney en 2011, il a voulu transformer rapidement l’enseigne en supprimant les rabais et en redéfinissant l’expérience client.
• Absence de victoires rapides : Johnson a lancé des changements radicaux sans générer de victoires rapides pour prouver la validité de sa stratégie. En n’ayant pas de succès visibles à montrer dès les premiers mois, il a rapidement perdu le soutien des employés, des clients et des actionnaires.
• Résultat : Le manque de victoires à court terme a contribué à la chute brutale de la rentabilité de J.C. Penney, et Johnson a été évincé au bout de 17 mois seulement, sans avoir pu convaincre de l’efficacité de sa stratégie.
Générer des victoires rapides est essentiel pour maintenir l’élan du changement et prouver que les efforts déployés produisent des résultats. Ces succès permettent de renforcer l’engagement des équipes, de convaincre les sceptiques et de crédibiliser la coalition directrice. En célébrant ces victoires et en les partageant largement, vous motivez les employés à continuer à travailler vers l’atteinte des objectifs à long terme.
7. Consolider les gains et produire plus de changements
Une fois que vous avez remporté des succès rapides, il est crucial de ne pas crier victoire trop tôt. Cette étape consiste à consolider les gains obtenus et à utiliser cet élan pour accélérer les efforts vers des changements plus profonds et durables. Kotter souligne que trop souvent, les organisations se relâchent après les premières victoires, compromettant ainsi l’aboutissement du changement complet.
Pourquoi c’est important ?
- Éviter l’autosatisfaction : après des victoires rapides, il est tentant de croire que le plus dur est passé et de se reposer sur ses lauriers. Or, cela peut entraîner une perte de dynamisme et mettre en péril la transformation globale. Il est crucial de rester concentré sur les changements à long terme et de ne pas ralentir l’effort.
- Renforcer les changements : les premières victoires offrent l’opportunité de prouver que le changement est possible. Ces gains doivent être consolidés et amplifiés pour éviter un retour aux anciennes pratiques. En renforçant les processus, les structures et les comportements qui ont conduit aux succès initiaux, vous ancrez le changement dans la durée.
- Maintenir l’élan : en utilisant l’énergie des premières réussites, vous pouvez augmenter la portée des initiatives de changement. Cela donne aux équipes un nouvel objectif et leur permet de voir que le changement est un processus continu, avec des améliorations constantes à l’horizon.
Comment le faire ?
- Analyser les succès obtenus :
- Prenez le temps d’évaluer les premières victoires pour comprendre ce qui a fonctionné. Cela permet d’identifier les facteurs de succès et les bonnes pratiques que vous pourrez répliquer dans d’autres parties de l’organisation. Il est essentiel de tirer des enseignements des réussites pour les adapter et les appliquer plus largement.
- Exemple : si un changement de processus a amélioré la productivité dans une division, analysez les raisons de ce succès et voyez comment il peut être étendu à d’autres divisions.
- Élargir la portée du changement :
- Utilisez les victoires comme tremplin pour engager des changements plus profonds dans d’autres domaines ou divisions de l’organisation. Kotter recommande d’accélérer les efforts en lançant de nouvelles initiatives pendant que l’élan est encore fort. Les changements réussis créent une dynamique que vous pouvez exploiter pour mettre en œuvre des réformes plus ambitieuses.
- Exemple : après avoir réussi à adopter un nouveau système informatique dans un service, vous pouvez planifier son déploiement dans toute l’entreprise.
- Impliquer plus de personnes dans le changement :
- Il est temps de mobiliser davantage de collaborateurs dans le processus de transformation. Les victoires initiales servent de preuves concrètes que le changement fonctionne, ce qui peut convaincre les plus sceptiques. Engagez de nouveaux leaders et élargissez la coalition directrice pour inclure d’autres managers ou influenceurs clés qui aideront à diffuser le changement à tous les niveaux.
- Exemple : après une première phase de succès dans l’amélioration du service client, vous pouvez impliquer des équipes supplémentaires dans d’autres départements pour améliorer l’expérience client dans toute l’organisation.
- Renforcer les nouvelles pratiques :
- Assurez-vous que les nouveaux processus et comportements sont bien ancrés dans la culture d’entreprise. Cela passe par la mise en place de nouveaux systèmes, politiques et outils pour maintenir les changements et en garantir la durabilité. Les structures de récompense ou de reconnaissance peuvent être ajustées pour encourager les comportements souhaités.
- Exemple : si la culture de l’innovation a permis des victoires, vous pouvez instaurer des mécanismes permanents (comme des comités ou des ateliers réguliers) pour continuer à encourager cette dynamique.

Exemples concrets
Exemple de réussite : Nike et la consolidation de l’innovation
- Contexte : après avoir introduit des innovations comme les chaussures Air Jordan et développé une image de marque forte, Nike a consolidé ces premiers succès en s’appuyant sur une culture d’innovation continue.
- Consolidation des gains : Nike a créé des équipes dédiées à l’innovation, renforcé son investissement en recherche et développement, et élargi sa gamme de produits. La consolidation des premières victoires a permis à l’entreprise de rester à la pointe du marché sportif.
- Résultat : en s’appuyant sur ses succès passés, Nike a continué d’innover et de dominer le marché mondial des articles de sport pendant des décennies.
Exemple d’échec : le relâchement d’AOL après ses premières victoires
- Contexte : dans les années 90, AOL était l’un des pionniers de l’Internet grand public. Grâce à des innovations comme ses services de messagerie instantanée, AOL a rapidement atteint une position de leader.
- Absence de consolidation des gains : après ses premières victoires, AOL s’est reposé sur ses acquis et n’a pas su adapter ses services à l’évolution rapide de l’Internet haut débit et de la concurrence accrue. Le manque d’investissement dans de nouvelles technologies a freiné sa capacité à rester compétitif.
- Résultat : incapable de capitaliser sur ses succès initiaux et d’accélérer l’innovation, AOL a été dépassé par de nouveaux acteurs comme Google et a progressivement perdu son leadership dans le secteur.
Consolider les gains est crucial pour garantir que les victoires rapides ne sont pas simplement éphémères, mais qu’elles servent de tremplins pour des changements encore plus profonds et durables. En renforçant les processus qui ont mené aux succès initiaux et en lançant de nouvelles initiatives pendant que l’élan est fort, l’organisation peut se transformer en profondeur et s’assurer que le changement s’inscrit dans la durée.
8. Ancrer les nouvelles pratiques dans la culture d’entreprise
La dernière étape consiste à ancrer les nouvelles pratiques dans la culture de l’organisation. Une fois que les changements ont été mis en place et que les victoires ont été consolidées, il est crucial de faire en sorte que ces nouvelles façons de faire deviennent durables. Kotter insiste sur le fait qu’un changement n’est réussi que lorsqu’il est solidement ancré dans la culture organisationnelle, c’est-à-dire qu’il devient une nouvelle norme pour tous les collaborateurs.
Pourquoi c’est important ?
- Éviter un retour en arrière : sans un effort conscient pour intégrer les nouvelles pratiques dans la culture d’entreprise, il existe un risque que l’organisation revienne à ses anciennes habitudes. Kotter explique que si les nouvelles pratiques ne sont pas solidifiées, elles peuvent être progressivement abandonnées, surtout lorsque les premières difficultés surgissent.
- Créer de la durabilité : ancrer les nouvelles pratiques dans la culture permet de pérenniser les changements. Cela garantit que les efforts de transformation, parfois longs et difficiles, ne seront pas perdus, et que l’organisation continuera de bénéficier des nouvelles pratiques et processus mis en place.
- Renforcer l’engagement : en intégrant les changements dans la culture, vous assurez que tous les collaborateurs adhèrent aux nouvelles normes et continuent de travailler dans le sens de la vision. Cela renforce l’engagement à long terme et assure une continuité dans les efforts de transformation.
Comment le faire ?
- Renforcer les liens entre les nouveaux comportements et la réussite :
- Pour que les nouvelles pratiques soient pleinement intégrées, il est important de montrer à tous comment elles ont contribué aux succès de l’organisation. Il faut créer un lien évident entre les victoires obtenues et les nouvelles pratiques afin que les collaborateurs comprennent que ces nouvelles façons de faire sont la clé de la réussite.
- Exemple : si la mise en place d’une nouvelle structure d’équipe a permis d’améliorer la productivité, il est essentiel de communiquer ce lien aux employés et de le répéter pour enraciner cette pratique dans la culture.
- Former et développer les leaders culturels :
- Kotter insiste sur l’importance des leaders culturels, des personnes qui incarnent les nouveaux comportements et valeurs. Identifiez et formez ces leaders, qu’ils soient officiels ou informels, pour qu’ils continuent à promouvoir et maintenir les nouvelles pratiques au sein de l’organisation.
- Exemple : si l’entreprise valorise désormais l’innovation, les leaders culturels doivent être ceux qui encouragent activement les initiatives innovantes et soutiennent les équipes qui prennent des risques calculés.
- Adapter les systèmes de gestion des talents :
- Pour ancrer les nouvelles pratiques, il est crucial que ces dernières soient soutenues par des processus et systèmes formels. Cela signifie que les nouvelles pratiques doivent être intégrées dans les processus de recrutement, de formation, d’évaluation et de récompense des employés.
- Exemple : si la collaboration entre services est un élément central du changement, il faut que les systèmes d’évaluation de la performance reflètent cet aspect en valorisant les efforts collaboratifs dans les critères de promotion ou de reconnaissance.
- Communiquer de façon continue :
- La communication autour des nouvelles pratiques et de leur succès doit être continue. Il faut rappeler régulièrement aux employés que les changements sont là pour rester et qu’ils font désormais partie intégrante de la façon dont l’entreprise fonctionne. En répétant le message, vous renforcez l’ancrage des nouvelles pratiques.
- Exemple : Organisez des réunions régulières ou des événements pour continuer à célébrer les succès liés aux nouvelles pratiques, afin de maintenir l’élan et de réaffirmer leur importance dans la culture.

Exemples concrets
Exemple de réussite : Procter & Gamble (P&G) et l’innovation continue
- Contexte : Procter & Gamble a fait de l’innovation un pilier central de sa stratégie de croissance. Après avoir mis en place des programmes internes pour encourager l’innovation, l’entreprise a veillé à ce que cette nouvelle orientation soit ancrée dans sa culture.
- Ancrer les nouvelles pratiques : P&G a intégré l’innovation dans ses systèmes de récompense, dans la formation de ses leaders et dans son processus de recrutement. L’entreprise valorise et reconnaît activement les employés qui lancent de nouvelles idées et favorise la collaboration interservices pour accélérer l’innovation.
- Résultat : l’innovation est désormais au cœur de la culture de P&G, ce qui lui a permis de rester compétitive et de maintenir son leadership sur des marchés hautement concurrentiels.
Exemple d’échec : Yahoo et l’incapacité à ancrer le changement
- Contexte : Yahoo a essayé à plusieurs reprises de se réinventer face à la montée de Google, Facebook et d’autres géants du numérique. Bien que des initiatives innovantes aient été lancées sous différentes directions, l’entreprise n’a jamais réussi à ancrer ces changements dans sa culture.
- Absence d’ancrage des nouvelles pratiques : chaque nouvelle direction de Yahoo a tenté d’introduire des changements sans réussir à soutenir durablement les nouvelles pratiques. Les anciennes méthodes de travail sont restées dominantes, les équipes n’ont pas intégré les nouvelles priorités, et les systèmes de gestion n’ont pas été ajustés pour soutenir les nouvelles pratiques.
- Résultat : en l’absence d’un ancrage solide des nouvelles pratiques dans la culture, Yahoo n’a pas réussi à transformer durablement l’organisation et à rester compétitif. L’entreprise a finalement été vendue à Verizon en 2017.
Ancrer les nouvelles pratiques dans la culture est essentiel pour garantir que le changement soit durable. En liant les nouvelles pratiques aux succès de l’organisation, en formant des leaders culturels et en adaptant les systèmes internes pour soutenir ces changements, l’organisation peut s’assurer que les nouvelles façons de faire deviennent la norme à long terme. Cette dernière étape est ce qui différencie un changement temporaire d’une transformation durable et réussie.
Une approche globale pour un changement durable
L’approche que propose Kotter est fondamentalement holistique, c’est-à-dire qu’elle considère le changement comme un processus global où chaque étape est liée aux autres. Les 8 étapes ne doivent pas être perçues comme des actions isolées, mais comme des éléments interconnectés qui se renforcent mutuellement. Cette approche holistique implique que chaque action, depuis la création d’un sentiment d’urgence jusqu’à l’ancrage des nouvelles pratiques dans la culture d’entreprise, fait partie d’un tout cohérent.
Cela signifie que chaque étape dépend du succès des précédentes et prépare le terrain pour les suivantes. En adoptant cette vision globale, vous assurez que les transformations ne sont pas des réussites ponctuelles, mais qu’elles s’inscrivent dans une dynamique de changement profond et durable. L’objectif est que les nouvelles pratiques deviennent naturelles et intégrées à la culture de l’organisation, garantissant ainsi que les efforts de changement se prolongent dans le temps et ne soient pas simplement abandonnés après les premières victoires.
SOURCES
1. Kotter, J.P., “Leading Change”, Harvard Business Review Press, 1996.
2. Kotter, J.P., “Accelerate!”, Harvard Business Review, 2012.
3. McKinsey & Company, “How to beat the transformation odds”, McKinsey Insights, 2015.
4. Harvard Business Review, “The Hard Side of Change Management”, HBR, 2005.