Tesla, du rêve électrique au cauchemar politique

Les chiffres sont brutaux : -59% en Allemagne, -63% en France, -44% en Suède, -38% en Norvège. En ce début 2025, Tesla s’effondre sur le marché européen. La marque qui incarnait l’innovation et la lutte contre le réchauffement climatique est devenue, en quelques mois, le symbole d’une Amérique trumpiste qui fait peur à l’Europe.

En janvier 2025, Tesla n’a immatriculé que 1 277 véhicules en Allemagne, son principal marché européen. Sa part de marché est tombée à 4%, contre 14% un an plus tôt. Un déclin vertigineux qui s’explique moins par la qualité des véhicules que par les frasques de son patron, Elon Musk, devenu le porte-étendard de l’extrême droite américaine.

Comment une marque qui incarnait l’avenir peut-elle aujourd’hui être associée à des idéologies rétrogrades ? Comment le génie visionnaire des voitures électriques est-il devenu le chantre du « Make America Great Again » ? Plongée dans la descente aux enfers d’une marque devenue toxique.

Elon Musk : génie visionnaire ou gros con ?

Il fut un temps où Elon Musk incarnait l’excellence entrepreneuriale à l’américaine. Le patron de Tesla et SpaceX apparaissait comme le nouveau Steve Jobs, capable de bousculer des industries entières par sa vision et son audace. Mais depuis son rachat de Twitter (devenu X) pour 44 milliards de dollars, le masque a craqué. Le génie s’est mué en provocateur compulsif, multipliant les dérapages et les soutiens à l’extrême droite.

En janvier 2025, il franchit une nouvelle ligne rouge en soutenant publiquement l’AfD, le parti d’extrême droite allemand. Un geste qui provoque un tollé en Europe, d’autant qu’il s’accompagne d’une déclaration choc : « L’Allemagne doit arrêter de culpabiliser pour le nazisme ». Cette provocation gratuite, qui fait écho à la rhétorique de l’AfD, déclenche un mouvement de boycott sans précédent.

Le patron de Tesla ne s’arrête pas là. Sur X, sa plateforme personnelle devenue le refuge de la droite dure américaine, il accuse l’Union européenne de « tuer la liberté d’expression ». Une attaque qui fait suite aux tentatives de régulation des réseaux sociaux par Bruxelles, notamment concernant la désinformation.

Son rapprochement avec Donald Trump et le mouvement MAGA (Make America Great Again) achève de transformer l’image de Musk. Ses apparitions aux côtés de l’ancien président américain, ses tweets relayant des théories complotistes, sa croisade contre le « wokisme » : tout concourt à faire de lui la nouvelle égérie de l’alt-right américaine.

L’incident le plus révélateur survient lors d’un événement public début 2025, où Musk effectue un geste ambigu, interprété par beaucoup comme un salut nazi. Bien qu’il s’en défende, arguant qu’il s’agissait d’un simple salut romain, l’épisode cristallise les critiques. Le génie visionnaire d’hier est devenu le troll en chef d’aujourd’hui, sacrifiant l’image de ses entreprises sur l’autel de ses obsessions politiques.

La transformation est si radicale que d’anciens admirateurs, comme l’entrepreneur allemand Dirk Rossmann, ne cachent plus leur déception : « Musk est devenu exactement ce qu’il prétendait combattre : un idéologue qui étouffe le débat plutôt que de l’enrichir ». Une critique qui résume le sentiment de nombreux Européens face aux dérives du milliardaire.

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Photo réalisé avec Grok, l’IA d’Elon Musk

 

Tesla : une marque qui paie le prix des délires de Musk

Les provocations politiques d’Elon Musk ne sont pas restées sans conséquences pour Tesla. Le constructeur automobile subit de plein fouet le rejet grandissant de son patron en Europe, comme en témoignent les chiffres catastrophiques de janvier 2025 : -59% des ventes en Allemagne, son plus bas niveau depuis 2021.

La chute est d’autant plus spectaculaire que Tesla dominait encore récemment le marché des véhicules électriques haut de gamme. Mais les grandes entreprises allemandes, soucieuses de leur image et de leurs valeurs, tournent désormais le dos à la marque. Rossmann, géant de la distribution, a ainsi gelé ses commandes dès août 2024. Plus significatif encore, SAP, leader européen des logiciels d’entreprise, a exclu Tesla de sa flotte de 30 000 véhicules. Une décision symbolique forte, qui a fait tache d’huile dans le monde corporate allemand.

Les sociétés de location automobiles emboîtent le pas. Hertz et Sixt, deux poids lourds du secteur, réduisent progressivement leurs commandes de Tesla. Un coup dur pour la marque qui comptait sur ces partenariats pour maintenir ses volumes de vente en Europe.

LichtBlick, fournisseur d’énergie verte allemand, a également rompu ses liens avec Tesla, citant explicitement le soutien de Musk à Donald Trump comme motif de rupture. Une position qui illustre le fossé croissant entre les valeurs environnementales portées par Tesla et les positions politiques de son patron.

Cette désaffection des entreprises reflète un malaise plus profond. Tesla n’est plus perçue comme une marque innovante et progressiste, mais comme le symbole d’une Amérique trumpiste hostile aux valeurs européennes. Un retournement d’image dévastateur pour une entreprise qui avait bâti son succès sur sa capacité à incarner l’avenir.

Les concessionnaires Tesla rapportent une multiplication des annulations de commandes et des demandes de renseignements sur les marques concurrentes. « Les clients nous disent qu’ils ne veulent plus être associés à Musk », confie un vendeur berlinois sous couvert d’anonymat. « Certains vont jusqu’à revendre leur Tesla pour acheter une autre marque, quitte à perdre de l’argent. »

Un boycott qui prend de l’ampleur

Le mouvement de boycott envers Tesla prend une dimension inédite en Europe. L’effet domino, déclenché par les grandes entreprises allemandes, s’étend désormais à l’ensemble du continent, créant un précédent dans l’histoire de l’automobile électrique.

Le cas de Rossmann illustre parfaitement cette dynamique. Le géant allemand de la distribution, qui possédait une flotte de 34 véhicules Tesla, a stoppé net ses commandes en août 2024. Une décision motivée non par des considérations techniques ou économiques, mais par un désaccord profond avec les positions politiques d’Elon Musk. « Nous ne pouvons pas continuer à collaborer avec une entreprise dont le dirigeant soutient ouvertement des idées contraires à nos valeurs », expliquait alors la direction.

Plus significatif encore, SAP, fleuron européen du logiciel, a exclu Tesla de son gigantesque parc automobile de 30 000 véhicules. Un choix qui résonne comme un désaveu majeur dans le monde de la tech, où Tesla était jusqu’alors considérée comme une marque de référence. Cette décision influence déjà d’autres entreprises technologiques européennes, soucieuses de leur image et de leur responsabilité sociale.

LichtBlick pousse la logique encore plus loin. Le fournisseur d’énergie verte allemand ne se contente pas de ne pas renouveler ses contrats avec Tesla : il communique activement sur ses raisons, citant notamment le soutien de Musk à Trump comme incompatible avec ses engagements environnementaux et sociétaux.

Ce boycott s’étend désormais au-delà des frontières allemandes. En France, plusieurs grandes entreprises du CAC 40 révisent discrètement leur politique d’achat de véhicules électriques, privilégiant des constructeurs européens ou asiatiques. En Suède et en Norvège, pays pionniers de la mobilité électrique, des associations de consommateurs appellent ouvertement au boycott de la marque.

La concurrence en embuscade

Pendant que Tesla s’enfonce dans la tourmente, ses concurrents ne restent pas les bras croisés. Volkswagen, en particulier, tire admirablement son épingle du jeu sur le marché européen, avec une hausse spectaculaire de 25% de ses ventes de véhicules électriques en Allemagne en janvier 2025. Le constructeur allemand, qui a massivement investi dans l’électrique, se positionne désormais comme l’alternative « raisonnable » à Tesla.

Polestar, la marque premium du groupe Volvo, mène une stratégie particulièrement agressive. Le constructeur suédois cible directement les clients déçus de Tesla avec des campagnes marketing subtiles mais efficaces. Son slogan « No drama, just driving » (Pas de drame, juste de la conduite) fait mouche auprès des acheteurs fatigués des controverses entourant Musk.

Les constructeurs chinois profitent également de la situation. BYD, déjà premier constructeur mondial de véhicules électriques en volume, accélère son expansion européenne. La marque, qui propose des voitures électriques technologiquement avancées à des prix compétitifs, gagne rapidement des parts de marché. Nio, autre constructeur chinois premium, multiplie les ouvertures de showrooms dans les grandes villes européennes.

Cette redistribution des cartes s’accompagne d’une évolution des critères d’achat. Si Tesla avait réussi à créer une communauté de fans inconditionnels, les acheteurs de voitures électriques privilégient aujourd’hui des valeurs plus traditionnelles : fiabilité, service après-vente, stabilité de la marque. Un changement qui profite aux constructeurs historiques et aux nouveaux acteurs asiatiques.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : alors que Tesla perd plus de la moitié de ses ventes en Europe, ses concurrents enregistrent des croissances à deux chiffres. Un basculement qui pourrait marquer un tournant décisif dans l’histoire de l’automobile électrique.

Quel avenir pour Tesla ?

La dégringolade de Tesla en Europe pose une question existentielle : la marque peut-elle survivre aux frasques de son patron ? Les signaux sont pour le moins inquiétants. La valeur de la marque Tesla a chuté de 26% en 2024, une hémorragie qui se poursuit début 2025.

En bourse, le verdict est tout aussi sévère. L’action Tesla est passée de 420 dollars début janvier 2025 à 358,39 dollars début février, soit une chute de 14,7% en un mois. Une dégringolade qui reflète les inquiétudes des investisseurs face à l’érosion des parts de marché en Europe et aux controverses incessantes d’Elon Musk.

Les investisseurs institutionnels commencent également à prendre leurs distances. Le fonds de pension néerlandais ABP, l’un des plus importants d’Europe, a ainsi désinvesti 571 millions d’euros de Tesla. Une décision motivée officiellement par des désaccords sur la rémunération de Musk, mais qui traduit aussi un malaise plus profond face à la gouvernance de l’entreprise.

Les analystes s’interrogent désormais ouvertement sur la capacité de Tesla à maintenir sa position dominante sur le marché des véhicules électriques. Si la marque conserve des atouts indéniables – une avance technologique, un réseau de superchargeurs efficace, une image de marque encore forte aux États-Unis – sa dépendance excessive à la personnalité de Musk devient un handicap majeur.

Certains évoquent même la possibilité d’une scission entre Musk et Tesla, à l’image de ce qui s’est passé chez Twitter avec Jack Dorsey. Une hypothèse qui semble peu probable tant Musk a lié son destin à celui de Tesla, mais qui illustre le dilemme de l’entreprise : comment se réinventer sans renier son créateur ?

Conclusion : une marque à la croisée des chemins

Tesla se trouve aujourd’hui dans une position paradoxale. La marque qui devait révolutionner l’automobile et sauver la planète est devenue, malgré elle, le symbole des divisions qui fracturent nos sociétés. L’effondrement de ses ventes en Europe n’est pas le fruit d’un désamour pour les véhicules électriques, mais la conséquence directe des positions politiques clivantes de son patron.

Les prochains mois seront décisifs. Soit Tesla parvient à se dissocier de l’image toxique d’Elon Musk, soit elle risque de se marginaliser durablement sur le marché européen. La concurrence, qu’elle vienne d’Europe ou de Chine, ne lui laissera pas de seconde chance.

L’histoire de Tesla pourrait ainsi devenir un cas d’école : celui d’une entreprise visionnaire sacrifiée sur l’autel des obsessions politiques de son fondateur. Une leçon que les futurs entrepreneurs feraient bien de méditer : dans un monde polarisé, même les marques les plus innovantes ne sont pas à l’abri d’un suicide commercial.

 

 

Sources :

  • Euronews, “Tesla sales crash in Germany as CEO Musk continues political activism”, 7 février 2025.
  • Business Insider, “Elon Musk’s politics are tanking Tesla sales in Europe”, 1er février 2025.
  • Fortune, “European largest pension fund sells Tesla stock over Musk’s leadership”, 12 janvier 2025.
  • CNN, “How Musk’s political activism is turning Tesla into a polarizing brand”, 28 janvier 2025.
  • Electrek, “Tesla boycott spreads across Europe due to Musk’s extreme-right connections”, 16 janvier 2025.
  • Les images de cet article ont été réalisées par une Intelligence artificielle.